Ce n'était pas le projet estival dont Layla avait rêvé.
Rédiger l'histoire d'une petite ville de Virginie-Occidentale et de sa manufacture de chaussettes, Les Inusables Américaines.
Et pourtant...
Eté 1938. Layla Beck, jeune citadine fortunée, refuse le riche parti que son père lui a choisi et se voit contrainte, pour la première fois de sa vie, de travailler. Recrutée au sein d'une agence gouvernementale, elle se rend à Macedonia pour y écrire un livre de commande sur cette petite ville.
L'été s'annonce mortellement ennuyeux. Mais elle va tomber sous le charme des excentriques désargentés chez lesquels elle prend pension. Dans la famille Romeyn, il y a... La fille, Willa, douze ans, qui a décidé de tourner le dos à l'enfance... La tante, Jottie, qui ne peut oublier la tragédie qui a coûté la vie à celui qu'elle aimait... Et le père, le troublant Félix, dont les activités semblent peu orthodoxes. Autrefois propriétaire de la manufacture, cette famille a une histoire intimement liée à celle de la ville.
De soupçons en révélations, Layla va changer à jamais l'existence des membres de cette communauté, et mettre au jour vérités enfouies et blessures mal cicatrisées.
À peine installé dans leurs appartements d'hiver (une grotte astucieusement aménagée entre la grande salle du foyer commun et " l'espace des rêves et de la jouissance " - l'équivalent de la chambre à coucher moderne -, sauf que tout le monde dort et fornique dans la même pièce), un petit groupe de jeunes femmes et d'enfants parti chercher de l'eau à la rivière voisine fait une rencontre qui va totalement bouleverser la vie de cette paisible tribu de Néandertaliens. D'un bosquet surgit soudain une créature inconnue dans leurs contrées, perchée sur de longues jambes plutôt fluettes, d'une hauteur à leur manger la viande sur la tête, avec les yeux à l'air, sans rien pour les protéger du soleil ou de la pluie, une drôle de face toute plate, sans visière, et un menton qui avance... Sans le savoir, La Grande, Blanche et les petits sont les premiers Néandertaliens à se trouver en face d'un Homo sapiens - " les Zigues ", comme ils les nomment, tant l'animal ne ressemble à rien de ce qu'ils peuvent connaître ni même imaginer. Perçue avec inquiétude par les uns, jalousie par les autres, la présence des nouveaux venus fait voler en éclats l'unité et le sens de la solidarité de cette tribu néandertalienne par nature pacifiste, libertine et écolo, tendance baba cool. Alors La Grande, qui n'a pas la langue dans sa poche, décide de tenir son Journal intime des événements, histoire d'ordonner, au moins dans son esprit, le chaos qui sème la zizanie chez les siens. Son attirance pour le beau Jorg, sémillant chef de file des Homo sapiens, ne va pas lui simplifier pas la tâche...
Cartes postales anciennes, lettres, publicités, échantillons de tissus, 600 pièces ont été nécessaires pour la réalisation de ce roman. Son héroïne, Frankie Pratt, a 18 ans lorsqu'en 1920 sa mère lui offre un journal. La jeune fille voudrait découvrir l'université et devenir plus tard écrivain. Mais il lui faut renoncer à ce rêve pour aider sa mère veuve et désargentée.
Une Japonaise installée en France dresse le portrait plein d'amour et d'effroi des Français au quotidien. Nôndé ! ? (Mais que se passe t-il ! ?) C'est la question que cette jeune femme, mariée à un Français depuis dix ans, continue de se poser chaque jour. Dans les transports, chez le médecin, dans un dîner en ville, à la campagne, sur la côte d'Azur, pour une cérémonie de mariage, lors des réveillons, face à un policier, une baby-sitter, sur un marché, dans des toilettes publiques ou dans un magasin de luxe. Eriko Nakamura fait le tour de nos façons d'être, en nous expliquant comment cela se passe chez elle. Pudeur, convention, raffinement poussé à l'extrême et volonté de ne pas se faire remarquer d'un côté. Individualisme, hédonisme et grande gueule de l'autre. La confrontation est nécessairement spectaculaire. Et les hallucinations quotidiennes.
Le médecin ? La scène classique d'un généraliste recevant dans son cabinet et demandant immédiatement de vous déshabiller est plus qu'inconcevable au Japon : ce serait un scandale national, et le médecin comme le patient se feraient sans doute hara-kiri. La police ? À Tokyo, chaque Japonais sait que, s'il a le moindre petit souci comme oublier son portefeuille, il pourra toujours compter sur le policier de son secteur pour le dépanner. À Paris, Eriko essaye de se faire à l'idée que les policiers ne sont pas du tout à son service. Les toilettes ? Quand on a l'habitude, comme tous les Japonais, de s'asseoir sur des toilettes impeccables et high-tech avec musique d'ambiance, vaporisation de parfum, triple jet d'eau et air pulsé, nos toilettes publiques sont. Nondé ! ? Pourtant, tout au long du livre on sent l'amour d'Eriko pour notre culture qui, malgré tous ses défauts, a l'extraordinaire avantage de donner à chacun, et surtout aux femmes, la capacité de se réaliser.
En cet été 79, Hugues a tout juste 12 ans. Il est l'aîné de trois garçons et vit avec ses parents à G., un petit village de campagne. D'ordinaire, il ne se passe pas grand-chose à G. Sauf que, depuis le début de l'été, le père de Hugues s'est mis à boire plus que d'habitude. Tout le monde, y compris la mère, fait comme si tout était normal. Mais plus rien n'est normal. Et au village tout le monde le sait.
Le père, plombier, passe plus de temps au bistrot que sur ses chantiers. Il ne rentre plus déjeuner, plus dîner, et tombe presque chaque nuit à bras raccourcis sur sa femme. Elle, n'ose plus sortir, fuit les voisins, porte des lunettes noires toute la journée et finit par demander, un soir, à Hugues, son aîné. de tuer son père. La vie serait tellement plus simple, plus légère, plus belle sans lui. Mais que peut faire un adolescent malingre et timide face à un tel colosse ? Se renfermer dans son monde, dessiner, et espérer des jours meilleurs... qui ne viendront pas. Ce n'est que lorsque le père rapporte un fusil à la maison que la mère se décide enfin à fuir avec ses trois enfants...
Le coup de boule de Zidane en finale de la Coupe du monde 2006 ? Un geste prémédité (contrairement à ce qui a été dit) qui confisque la victoire aux Italiens et dévoile le vrai visage de ce match : un duel Zidane/Materazzi.
La folle joie de Platini courant bras levés après un penalty malgré les trente-neuf personnes qui ont trouvé la mort, piégées dans l'effondrement du stade du Heysel ? Il avouera plus tard à Marguerite Duras que c'est ce jour-là qu'il est véritablement devenu un homme, connaissant successivement et dans le même élan sa plus grande joie et sa plus grande honte.
La main de Maradona en quart de finale de la Coupe du monde 1986 ? Il reconnut avoir marqué un but " un peu avec la tête de Maradona " et " un peu avec la main de Dieu ", révélation que Dieu ne démentit pas.
Éric Cantona répondant à l'insulte d'un supporter en lui sautant dessus pied droit en avant tel un as du kung fu ? Par ce coup de sang, " Éric the king " faisait trembler la frontière a priori étanche entre le terrain et le monde réel, comme si un personnage de fiction s'échappait pour se mesurer aux mortels.
Thierry Henry qui, de la main, qualifie la France au mondial 2010 ? Un geste qui pose la question de la fin et des moyens, et du prix du silence au milieu d'un vortex de commentaires tous plus moralisateurs ou cyniques les uns que les autres. Examinant successivement ces cinq cas, Ollivier Pourriol montre que seuls les dieux du stade sont capables de ces " mauvais gestes " là : tellement contre-exemplaires, impensables, qu'ils en deviennent finalement exemplaires. De quoi ? D'une forme de beauté par-delà le bien et le mal, d'une liberté pure et scandaleuse qui nous fascine secrètement, quand bien même nous voudrions les condamner.
Qu'on ne s'y trompe pas : les nouveaux jeux du cirque sont la Coupe du monde de football, et ce que viennent voir ses milliards de téléspectateurs sont moins les beaux gestes que les mauvais.
Comment se construire contre ses parents ? C'est, au fond, le sujet de ce roman graphique, second volet du travail autobiographique entamé par Hugues Barthe avec L'Été 79.
Nous retrouvons Hugues là où nous l'avions laissé à la fin du premier volume. Sa mère, anéantie par la violence de son mari, s'est enfuie de la maison familiale et s'est réfugiée, loin du village, chez une amie en ville.
Hugues, lui, est envoyé chez sa tante Dominique et son époux à Besançon. Pour le jeune garçon qui n'est jamais sorti de sa campagne, c'est un émerveillement. Il découvre la ville - les magasins, les musées, les cafés, les librairies -, une vie de famille où les rires remplacent les coups - cela existe donc ! - et une mère de substitution enjouée, rieuse, curieuse, avec elle il peut parler de tout - à la différence de sa propre mère, mutique et dépressive...
Mais cette parenthèse enchantée ne dure qu'un temps car, à la fin de l'été, Dominique lui annonce une " bonne " nouvelle qui est en fait une terrible nouvelle : sa mère est retournée vivre avec son père. L'adolescent revient donc chez lui et, rapidement, tout recommence : l'alcool et la violence du père qui, tous les soirs, se déchaîne contre sa mère.
Cela durera dix ans encore, dix années pendant lesquelles Hugues grandira sans espoir, sans avenir, isolé dans sa campagne, avec la bande dessinée pour seul refuge. Il sait qu'il doit fuir mais il n'y arrive pas. Le déclic viendra de l'annonce de la maladie mortelle de sa mère. La sachant condamnée, Hugues prend un appartement en ville et décide de vivre de sa passion : la bande dessinée.
Cléo est une jeune femme presque comme les autres. Elle n'est pas mince, mais elle n'est pas grosse non plus. Elle n'est pas moche, mais elle n'est pas top model non plus. Elle n'est pas idiote mais elle dit des bêtises. Elle n'est pas folle mais elle fait des bêtises. Bref, c'est une fille comme les autres et qui, comme les autres, se demande si elle n'est pas différente. Une jeune femme prétendument ordinaire. Un matin, elle part de chez elle rejoindre l'homme qu'elle vient de rencontrer. Il pleut, elle va s'abriter dans un café et toute sa vie défile dans ses rêveries. Sa vie, autant dire sa vie amoureuse car c'est surtout cela qui préoccupe Cléo depuis l'adolescence : les mecs. Et un mec, elle n'en a pas. Ou plutôt elle en a trop. Pourquoi ça ne marche jamais ? Parce que Cléo est comme ça : amoureuse d'un homme, puis d'un autre, toujours à l'écoute de ses désirs et à la recherche du prince charmant. Et si, ce matin, elle partait rejoindre le bon ? Grâce à ses inventions visuelles, Fred Bernard transforme la vie intime de Cléo en tourbillon graphique. Une vie intime qui en dit beaucoup sur notre époque puisque rien n'est inventé dans cette histoire : les propos ont été entendus, les situations ont été vues ou vécues. Bref, Cléo n'existe pas et tout n'est pas arrivé à la même personne, mais tout est vrai !
Fidèle à sa méthode d'explication de la philosophie par le cinéma (et accessoirement du cinéma par la philosophie), Ollivier Pourriol décode les grandes théories du désir en les illustrant par des scènes de films célèbres. Et répond ainsi, de façon extrêmement vivante, à toutes les questions que nous nous posons - ou devrions nous poser :
- Qu'est-ce qui rend un objet désirable ? Réponse avec René Girard et Blow-Up.
- Pourquoi désire-t-on la Lune ? Réponse avec Hegel et L'Étoffe des héros.
- Se rendre désirable, est-ce se faire aimer ? Réponse avec Sartre et Les liaisons dangereuses.
- Comment tombe-t-on amoureux ? Réponse avec Stendhal et American Beauty.
- Pourquoi désire-t-on la violence ? Réponse avec Hegel, Girard et Fight Club.
- Désire-t-on une femme ou le paysage caché dans cette femme ? Réponse avec Deleuze, Proust, et Casino.
- Comment se répand la peste du désir ? Réponse avec Girard et Mort à Venise.
- Comment met-on fin à la rivalité inscrite dans le désir ? Réponse avec Girard, Le Parrain et End of Violence.
- Le désir est-il un manque ou une richesse ? Réponse avec Platon, Deleuze, Requiem for a Dream et American Beauty.
Au final, une véritable philosophie du désir se dessine. Précise, solide, utile mais aussi accessible, imagée, ludique.
« A tout à l'heure mon petit chat », lance gaiement un père à sa fillette de neuf ans, qui ne le reverra jamais. Un mystère tombe et ne quittera plus la narratrice : la mort. Alors que les adultes font entendre leurs sanglots, un étrange silence se fait en elle, celui du bruit des clefs que son père lançait à l'entrée de la maison. Sans ce tintement familier qui rythmait l'enfance, il faudra donc faire résonner dans la vie une autre musique... Anne invente la sienne, discrète et entêtée, à mesure que se succèdent les disparitions. Elle relève le défi qui lui est lancé, regarde le passé de toute une famille éteinte droit dans les yeux, apprend comment les siens ont été broyés par la Shoah et découvre, dans le même temps, la force de son legs. De la merveilleuse imprimerie de l'oncle Léon, située passage de l'Espoir, rien n'a été sauvé de la barbarie nazie... Sauf, peut-être, l'éternité de l'espoir. Libre d'être seule, solitaire dans l'exercice de cette liberté, Anne peut retrouver une enfance idéale dans ce que son père a créé : les aventures d'un Gaulois, les facéties d'un écolier prénommé Nicolas, et l'affection immense que portent à ces personnages des millions de lecteurs dont les yeux pétillent dès qu'ils voient apparaître sur une couverture le nom du père d'Anne - ce nom qui est aussi le sien, Goscinny. Mais pour se le réapproprier pleinement, encore faut-il bâtir une passerelle vers un imaginaire plus intime, cristallisé en un lieu dérobé, là ou se recueillent les quelques souvenirs fragiles d'un amour fou entre père et fille. Ce sont ces images-là, nichées dans le secret de sa mémoire, que l'auteur rassemble dans une quête fondamentale, avec l'aide de tous les pères de substitution qui l'ont suivie pas à pas.