Sciences humaines & sociales
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Le féminisme se porte-t-il sur un t-shirt ? Kim Kardashian est-elle un objet sexuel ou une femme puissante ? La série Grey's anatomy peut-elle changer la vie des femmes ?Dans un essai à la première personne documenté, passionné et engagé, Jennifer Padjemi, journaliste spécialiste questions de société, explore l'alliance, pour le meilleur et pour le pire, du féminisme et de la pop culture. En reprenant le fil des mouvements féministes modernes, de l'émergence d'un féminisme intersectionnel au mouvement « body positive » en passant par Me too et en se basant sur son expérience de femme noire, elle décortique le rapport que nous entretenons avec les objets culturels les plus populaires. Biberonnée aux clips vidéo, chansons grand public et maintenant aux séries TV, notre consommation de divertissement façonne, accompagne, et parfois challenge notre vision du monde. En utilisant la pop culture comme un miroir de notre société mondialisée, l'auteure questionne à travers elle le féminisme, le genre, la sexualité, l'intersectionnalité.Jennifer Padjemi interroge les liens d'interdépendance entre consommation de masse et idéologie progressiste, et jette un regard joyeux et lucide sur nos divertissements, sans concession au patriarcat.Un livre à mettre entre toutes les mains !
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Le village de Lodi, à une centaine de kilomètres au sud-ouest d'Alger, près de Médéa, porte le nom prestigieux du pont italien qui a permis aux troupes de Napoléon d'entrer victorieuses à Milan.
Il incarne aussi un épisode occulté de l'histoire.
C'est là, pendant la guerre d'Algérie, que des centaines de pieds-noirs, sympathisants de l'indépendance, ont été enfermés de façon arbitraire. Des années durant, ils ont croupi dans des baraques délabrées, entourées de barbelés, inspectées jour et nuit par une armée de gendarmes mobiles, loin des regards indiscrets et des grandes villes. Sans avoir été jugés ni même inculpés. Sur simple arrêté préfectoral, la « lettre de cachet » des années noires du conflit algérien.
Parmi la dizaine de « centres d'hébergement », qui sont nés après l'insurrection du 1er novembre 1954, Lodi occupe une place à part. C'est le camp des Français, le camp des pieds-noirs. Là se sont croisés des médecins, des architectes, des cheminots, des gaziers, des électriciens, des résistants de la Seconde Guerre mondiale, des anciens internés de Dachau... Mais aussi Albert Smadja, l'avocat de Fernand Iveton, seul Français du conflit guillotiné pour avoir tenté de faire sauter une bombe ; Georges Hadjadj, le dernier compagnon de cellule du professeur de mathématiques Maurice Audin, qui a « disparu » après une ultime séance de gégène ; ou encore Henri Alleg, l'auteur de La Question, arrivé à l'été 1957, après avoir été torturé des jours durant par les parachutistes. Et beaucoup d'autres encore.
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à feu et à sang ; de la guerre civile européenne, 1914-1945
Enzo Traverso
- Stock
- 24 Janvier 2007
- 9782234059184
La première moitié du XXe siècle fut une époque de guerres, de destructions et de révolutions qui mirent l'Europe à feu et à sang. De l'explosion du vieux monde en 1914 au nouvel équilibre instauré en 1945, le continent connut des temps de catastrophe et de chaos.
Pour Enzo Traverso, la notion de « guerre civile européenne » permet de rendre compte de cette terrible combinaison de guerre totale sans front ni limites, de guerres civiles locales et de génocides, qui vit aussi l'aff rontement de visions opposées du monde. Dans une ample perspective solidement documentée, il en brosse les principaux traits : le mélange de violence archaïque, de violence administrative froide et de technologie moderne pour anéantir l'ennemi, la brutalisation de populations jetées dans l'exode ou l'exil, le déchaînement émotionnel des confl its entre civils au sein de sociétés déchirées (URSS 1917-1923, Espagne 1936-1939, Résistance 1939-1945) ou encore l'irruption de
la peur et l'eff roi de la mort dans l'esprit des hommes. Restituant également leur place aux protagonistes engagés, il analyse les positions de ces intellectuels de l'entre-deux guerres qui, à partir d'un égal rejet du monde en l'état, optèrent de façon opposée pour le communisme (tels Gramsci ou Benjamin) ou pour la révolution conservatrice (tels Jünger ou Schmitt). Il revient de même sur le combat des militants et résistants antifascistes, sans pour autant esquiver la question des liens avec le stalinisme ou celle de l'aveuglement face au génocide.
Ce livre s'inscrit ainsi contre une relecture de cette période de l'histoire qui, sous couvert d'une critique des horreurs du totalitarisme, tend à rejeter les acteurs, fascistes ou antifascistes, dans le purgatoire indistinct des idéologies, comme si, derrière les victimes, aujourd'hui célébrées, tous les chats du passé étaient gris.
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« Comment a-t-on pu atteindre un tel niveau de déliquescence, cinquante ans après, du "soleil" de 68 au crépuscule du PS ? » se demande Benjamin Stora. De cette question est né ce livre, écrit en témoin et historien. Stora appartient en effet à ce courant de l'après-68 qui, après s'être engagé dans l'extrême gauche trotskiste, est entré au Parti socialiste.
Il revient sur cette histoire à travers la sienne : l'engagement révolutionnaire vécu comme une libération en arrivant d'Algérie, puis l'entrée au PS, en 1986, avec l'illusion d'y poursuivre les mêmes batailles politiques. Un drame familial l'éloignera finalement du militantisme. Benjamin Stora porte un regard lucide sur ce qu'il n'a pas toujours vu en temps et en heure : les erreurs ou les dérives de certains. Cet examen de parcours est ponctué de rencontres, avec Jospin, Cambadélis ou Mélenchon.
Au-delà des souvenirs et des anecdotes surprenantes, ce livre offre une analyse éclairante sur la façon dont le Parti socialiste a d'abord « absorbé » les aspirations de 68 à changer la vie, avant de les étouffer. Pour finir lui-même à bout de souffle.
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Tokyo, ville flottante ; scène urbaine, mises en scène
François Laplantine
- Stock
- 14 Avril 2010
- 9782234063976
Pour l'anthropologue François Laplantine, découvrir Tokyo, c'est d'abord se défaire des images et idées préconçues, se laisser surprendre, accueillir les émotions et observer la scène urbaine telle qu'elle se livre et s'expose.
Attentif aux transformations du paysage citadin, aux attitudes corporelles des passants, aux modes vestimentaires des adolescents, aux flux et réseaux de circulation, à la signalétique ou aux formes esthétiques, il décrit avec un sens aigu du détail sensible, un lieu perpétuellement changeant. Un espace dans lequel la vie sociale apparaît également fluctuante, ou rien n'est permanent, ni univoque. La nature, qui est à l'état brut un péril menaçant, est apprivoisée et célébrée.
L'hyperconsommation, bâtie dans une culture de la méditation, est aussi tempérée par une retenue venue du bouddhisme. Et tandis que le capitalisme affiche sa logique de la performance, les comportements individuels ont souvent quelque chose de flou, de rêveur, d'indécis. D'où cette impression de fluidité, de flottement décontracté. Mais n'y aurait-il pas un envers du décor ? La littérature, et plus encore le cinéma, donnent en effet une autre vision de la ville et de la société japonaises, plus âpre, plus sombre ou plus angoissée, entre l'éclat de la révolte et la hantise de la disparition.
Confronter les deux, dans cet étonnant parcours, tout à la fois visuel, émotionnel et réflexif, c'est mettre le regard et la pensée à l'épreuve.